Le marathon des Seychelles ou le paradis retrouvé !
Un marathon au Seychelles, cela ne se refuse pas. On a tous en mémoire ces images de carte postale de plage immaculée entourée de quelques palmiers tarabiscotés et des rochers immenses de granit rose. Aussi quand on m’a demandé de venir couvrir cet Eco’Friendly marathon, dixième du nom, j’ai bien évidemment dit banco !
6h30. Plage de Beauvallon. Nord Ouest des Seychelles. Dimanche 26 février. Il pleut. Mais pas une petite pluie de fin de printemps en France. Non, non une bonne pluie torrentielle des Tropiques. Vous savez le truc qui donne l’impression que quelqu’un là-haut a laissé le robinet grand ouvert. L’expression il pleut à torrents n’a jamais aussi bien porté son nom. Même les quelques mètres d’échauffement prennent alors des allures de supplice. Bien sûr du coup, la température est un peu plus douce. Mais encore. Peut-être 28°C au lieu des 32°C habituels ? Allez savoir ! Nous sommes tous serrés les uns contre les autres à attendre le coup de pistolet libérateur. Plus que dix minutes. Tant pis pour l’échauffement recommandé. Ici de toute façon, tout le monde est chaud très vite. Cette proximité non voulue, ce rapprochement forcé, nous permet au moins de faire des connaissances. Je me trouve coincé entre une bénévole locale en charge d’un poste de ravitaillement à l’arrivée et une coureuse bien affûtée en tenue hyper ligth et donc elle aussi mouillée de la tête aux pieds. Elle me dit qu’elle a gagné l’épreuve l’an passé et que l’organisation l’a donc invité à revenir pour défendre son titre. C’est cool les Seychelles. Elle se prénomme Olivia et me raconte aussi qu’en 2016 donc, il faisait vraiment très chaud et qu’elle a remonté et remonté des concurrents complètement déshydratés au fil des kilomètres pour finalement prendre la troisième place au général. Wouaahh ! Hyper encourageant tout ça ! Le départ prend du retard. Sous ce déluge, il est difficile de mettre en place quoique ce soit et même si les Seychellois sont forcément rôdés à ces épisodes météorologiques pour le moins intenses, il faut savoir s’adapter. Et dire que la veille, la pluie ainsi est tombée durant trois heures sans baisser d’intensité. Cela laisse perplexe. Peut-être que finalement, ce sera toujours mieux que le gros soleil ? Car j’ai encore en mémoire mon entraînement d’il y a deux jours, à la sortie de l’avion et l’humidité proche des 90% mêlées donc à une chaleur accablante, m’ont littéralement scotché sur place. Ici, on ne vient pas pour battre un chrono ou pour faire le fanfaron. On vient pour terminer et ce n’est déjà pas si mal. Les chronos des années passés parlent d’eux-mêmes. 3h30’ pour le vainqueur 2016 qui est d’ailleurs au départ. Simon, la gloire locale. Le parcours avec ses 1000m de D+, voire un peu plus, est aussi là pour vous rappeler à l’ordre. C’est une épreuve vraiment rude, rugueuse et si vous n’avez pas trop de temps pour vous familiariser avec la météo, alors il faudra juste se contenter d’aller le plus lentement possible pour juste franchir la ligne d’arrivée. A 7h20 pourtant, le départ est enfin donné… et miracle, la pluie se calme un peu. C’est la première vague avec ceux du marathon et du semi mélangés. Ensuite, une demi-heure plus tard, ce sera le tour des coureurs du 5 et du 10 km. En tout peut-être 2000 personnes, pas loin des 3000 et beaucoup, beaucoup d’enfants. Nombreux sont ceux, aussi, qui n’ont pas fait le déplacement, calmés par la météo. On s’en doute.
Le début du marathon nous fait faire une petite boucle de 5km dans Beauvallon, comme un aller-retour assez difficile psychologiquement car quand on repasse devant la ligne de départ, on sait que c’est très loin d’être fini. Deux hommes ont pris la tête d’emblée. Geno Belle, le Seychellois, roi du marathon, et Iven Moïse, son pote, intouchable sur semi, déjà deux fois vainqueur ici même. Derrière eux, de nombreuses nationalités sont représentées. Des Tchéques, des Sud-Africains, des Coréens aussi et c’est bien normal puisque l’instigateur principal du marathon n’est autre que l’ambassadeur de Corée aux Seychelles… Je sens d’emblée que ça va être très très dur. Et je suis surpris de ne trouver que de l’eau sur les ravitaillements. Je me dis que c’est peut-être juste sur le premier et pourtant non sur le deuxième et puis le troisième, juste de l’eau et des éponges fraîches. Ouf ! Pour moi qui suis parti hyper light avec juste deux petits gels en poche et ma gourde en main, cela va vite devenir « mission impossible » ! J’essaye de profiter un peu du paysage. Sur les bas-côtés en effet, c’est une suite de places plus magnifiques les unes que les autres. Malheureusement, le parcours n’étant jamais totalement plat, on ne peut guère se laisser aller à rêvasser. Cela fait mal de monter sous la chaleur revenue. Je sais que devant, ils sont une poignée à se défendre le titre 2017. Je ne sais pas combien exactement mais c’est le cadet de mes soucis en ce moment. J’ai réduit mon allure volontairement et j’essaye de penser à autre chose. Pourtant vers le 13ème km, c’est aussi une occasion de faire demi-tour. C’est le point en effet de pointage et de retour pour tous ceux qui sont inscrits sur le semi. Je n’ai vu qu’un seul coureur revenir en sens inverse. Sachant que je n’aurais de toute façon pas assez à manger pour tenter d’aller au bout, pour en gros 3h45 d’effort tout de même, j’explique ma situation aux gars de l’organisation sur place et ils décident de me faire basculer sur le semi. Alléluia. Je n’en demandais pas tant. Mais bon un semi dans ces conditions, cela me convient tout à fait. Je préfère ne pas avoir à subir les journées suivantes à récupérer mais plutôt profiter d’autres excursions sécheylloises à venir. Je remets donc un petit coup d’accélérateur entre le 13ème et le 18ème histoire de prendre un peu d’avance pour consolider cette deuxième place, qui avouons-le, ne veut pas dire grand-chose aujourd’hui, mais je vais avoir tellement de mal à boucler mon périple que je m’insulte presque en me disant que je n’aurais jamais dû ainsi accélérer. Ici, pas le choix, dès que vous allez un peu trop vite, vous le payez cash juste après ! A 3 km de la ligne, c’est aussi le moment où l’on se retrouve mélangé à ceux du 10km et aussi à la fin du 5km. Véritable marée humaine qui essaye de se faire un petit chemin entre les voitures et les bus. Moment un peu à part pour un marathon hors norme, pour le moins floklore. Ici il faut oublier tous ceux que l’on sait de nos organisations françaises bien carrées et huilées. La circulation n’est tout simplement pas coupée. Il faut faire attention à une voiture qui peut vous serrer de trop près. Cela fait partie du décor. Un petit bout d’Afrique finalement qui s’offre à nous. Cela ne me dérange pas outre mesure. De toutes façons, sur la fin, les voitures forment un gros bouchon comme une sortie de boulot sur la rocade. Sur le moment, les coureurs ont la priorité puisqu’ils vont plus vite. Je suis content de terminer même si complètement HS. Je me dirige aussitôt vers le ravitaillement pour boire de tout mon saoul. De l’eau, des jus locaux, tout y passe. J’ai même droit, en tant que participant au semi du coup, à une coco toute fraîche. Un vrai régal après ce que l’on vient de subir. J’ai plus qu’à retirer mes baskets détrempées pour me plonger dans l’Océan Indien qui borde l’arrivée. Enorme sensation. La température descend d’un coup. Je reviendrais quelques minutes après sur la ligne avec mon appareil photo. C’est la Coréenne Sunmi Moon qui va l’emporter cette année en moins de 4h sur le marathon. Olivia, la fille du départ, Peytour de son nom, prendra quand même la deuxième place, complètement exténuée. Au bout du rouleau. Elle qui connait pourtant si bien les lieux et ces conditions pour avoir habité plus d’un an sur place. Geno Belle gagne l’épreuve reine donc mais ses adversaires ne sont pas si loin. 3h03’ pour lui. 3h04’ pour un Sud-Africain et 3h06’ pour un Coréen. Cela s’est joué dans un mouchoir de poche finalement ! Je retrouverais plus tard mes collègues français, venus également se tester sur cette épreuve hors-norme. Chacun aura tenté une distance précise, selon sa forme et son niveau. Pourtant je ne peux qu’attribuer une petite mention particulière à Olivier qui sera le seul à aller au bout du marathon. En 7h certes mais c’est déjà énorme. Le marathon se finira officiellement le soir même à l’hôtel partenaire, le Barjaya, par une remise des prix tout à fait grandiose dans le cadre des échanges entre les Seychelles et la Corée du Sud. Petits fours, tenues de soirée, présence des plus hautes autorités locales, repas de gala et remise haute en couleurs avec prix et primes distribués aux cinq premières hommes et femmes des deux courses : semi et marathon. Vraiment un grand moment comme on en vit peu en France.
C’est ça aussi les Seychelles !
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